Cette année 1994 de merde

Je ne sais pas si c'est la froideur hivernale, le manque de sommeil ces temps-ci ou tout simplement une des mes introspections habituelles, mais je suis en pleine période souvenir.

Ho, c'est pas des souvenirs charmant, c'est même des souvenirs qui sont assez désagréables, mais qui m'ont surtout permis d'évoluer un petit peu dans ce monde... Enfin, je crois.

En fait, c'est cette année, l'année 1994 qui a pas mal changé de choses dans ma petite vie. J'étais encore un adolescent boutonneux, mal dans ma peau. Je venais de planter ma seconde royalement dans un lycée pourri, plus par jemenfoutisme que par réelle capacité, non pas que je sois un crack, mais je dois dire que le lycée et toutes les conneries qu'on peut bien nous apprendre n'a rien d'extrêmement compliqué.Enfin bref, passons sur ce qui suit.

En mai 1994, en grand passionné de Formule 1 que je suis (ouais je sais, il faut pas le dire), j'étais entrain de m'enflammer devant ma télé sur le duel Schumacher Senna au grand prix de Saint Marin, quand je vis la mort en direct: Roland Ratzenberger venait de se planter un bel après midi du mois de mai, sa voiture venant se fracasser lamentablement sur le bas coté. Ce n'était pas un grand pilote, juste un mec qui faisait bien son boulot et qui arrivait enfin à monter dans un baquet de F1. Il venait de perdre la vie, et j'assistais à ça, comme quelques autres milliers de spectateurs.

Il y avait aussi la dernière phrase de Senna à ce moment au micro d'une télé, par casque interposé: Alain, tu me manque...et la mort s'ensuivit pour lui aussi, et cela a tourné au drame pour ton peuple....Fin bref, les héros sont pas éternels, on meurt tous un jour même en prenant des risques alors qu'on est millionnaire... Marrant le monde.

Marrant aussi le suicide d'un mec qui faisait partie d'un groupe mondialement connu que j'écoutais en boucle en ce moment la, sur mon vieux lecteur de K7....Je sais toujours pas pourquoi ce tocard a fait çà, alors que la nouvelle formation présentait un nouveau départ et un nouvel élan...

J'ai arrêté d'écouter ce groupe, qui m'apportait plus rien, vu que les héros ne sont pas éternels....

Je sais, je sais, attacher trop d'importance à la mort de gens qu'on ne connaît pas n'a aucun intérêt. C'est comme s'émouvoir d'une pauvre ex princesse blonde qui se tue sous un pont... Ça n'a aucun intérêt. Mais que voulez vous, quand on a 16 ans et des poussières, on doit ressentir un peu plus les choses, surtout quand on n'est pas forcément bien dans sa peau, ni même et peut être surtout dans sa tête.Enfin, dans mon cas, ça se voyait un peu mais pas trop. Je suis pas un excité de la vie pour certaines choses, j'ai pas besoin de montrer ni de faire ressentir le poids des choses pour me sentir exister... enfin bref...

L'année scolaire vient de se terminer. Je passe en première... Cool. Peut être un nouveau départ. j'en sais encore trop rien. envie de bouger de faire des choses mais je suis paralysé. De toute façon, mes parents ont besoin de moi pour l'été et j'ai pas d'autre choix que de monter la garde. Parce que c'est de cela que mon Job consiste. Monter la garde. Attendre et servir. Toute l'histoire de ma vie peut être, me demandais-je à ce moment la.Toujours est-il que j'ai pas trop ma pseudo bande de potes. Je dis pseudo parce que je pouvais pas en encadrer les trois quarts, mais bon, quand on apprécie des gens, on fait abstraction du reste....Ça devait être en octobre. Je sais plus quel jour. J'ai oublié, avec le temps, j'ai oublié.Et je te prie de me pardonner. Je sais, ça se fait pas, mais que veux-tu, c'est un souvenir de merde et j'ai pas franchement l'envie de revivre cela.J'avais pas de nouvelles depuis trois mois. Je me suis dit: tiens, je vais appeler, faudrait quand même que je passe le voir. Je compose le numéro, les sonneries défilent. Ça décroche. C'était la voix de ta mère. J'ai raccroché au nez. Je sais pas pourquoi, mais j'ai raccroché. Je me l'explique toujours pas alors que j'aimais bien ta mère, elle était cool.Toujours est-il que trois heures plus tard, un autre appel. Un pote à toi. Air triste, voix morne, je sais pas, je me suis imaginé plusieurs choses et la seule chose que j'entendis, c'est 'F.... est mort".Ouais, mort. Fauché par une bagnole alors qu'il rentrait du bahut. il venait d'acheter une 125, un kawa, qu'il avait monter en super motard. C'était pas un fan de la moto, ni quelqu'un qui se déplaçait seul, mais bon, il avait fait son choix. Il rentrait du bahut avec un de mes pseudo pote et une bagnole l'avait pas vu et l'a fauché....

Mort presque sur le coup.

Tu sais man, ce jour là, j'aurais aimé prendre ta place. Je sais ça se dit pas, mais je pense que tu aurais fais plus de choses dans ta vie que moi. Je me surprend encore à rêver à remonter le temps et arriver à ce jour, pour empêcher cette connerie d'arriver. A 17 ans, on crève pas, on a autre chose à foutre qu'a clamser sur une route de France au beau milieu de l'après midi.Enfin, s'ensuivit tout le cirque "médiatique": les larmes, les cris, les empoignades, les je comprend pas., le cimetière et les 100 personnes présentes...Oui, y avait pas mal de monde qui t'aimait. Tu avais jamais embrassé une nana et encore moins couché avec, alors que deux ou trois te plaisait...Tu n'avais pas encore le permis, ni même touché à un pet.

Tu serais pas devenu un des meilleurs programmateur de la Silicon valley...
Tu ne deviendras pas le pire clochard que la terre est portée...

Fin bref, cette année là finissait en beauté. Je perdais mes "idoles", je perd un pote, un ami, presque un frère (mais chut, je ne l'ai dit à personne, alors gardez cela pour vous). Non décidément cette année là n'était pas bonne, et c'était peut être pour cela que j'ai commencé à vivre je crois. A sortir en boite, me pinter la gueule, bosser enfin mes cours pour avoir une première et un bac ensuite. C'est à ce moment là que je me suis vraiment mis à fumer. C'est aussi à ce moment là que je suis monter sur une MotoCross et que j'ai sillonné toutes les pistes de la région en quête de sensation fortes. C'est aussi à ce moment là que je me suis acheté une basse pour sillonner les petites formations de la région en quête d'un son nouveau.C'est aussi à ce moment là que je me suis ouvert aux autres, que j'ai commencé à tchatcher comme jamais avec mecs comme filles.

C'est sûrement à ce moment là que j'ai osé aborder les filles et non pas attendre qu'elles viennent à moi, avec tout ce que cela peut comporter comme risques...Enfin bref, c'est peut être au cours de cette année de merde que ma vie, ma misérable existence a pris un sens et que le début de quelque chose s'est fait sentir.

Oui pour ton cela mon frère, mon ami, mon pote, cette année là est une année de renaissance. Et j'aurais aimé vivre la suite avec toi...Mais on ne change pas le cours des choses.. Le spectacle doit continuer.

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