Un texte comme ça

Le gros avantage, quand tu es quelqu'un comme moi
C'est que tu peux dire à peu près tout ce que tu veux.
Pourquoi?
Simple, tu passes complètement inaperçu.
La plupart des gens veulent être quelqu'un.
Quelqu'un d'important, qui compte.
Je suis de passage.
L'avantage, donc, c'est de pouvoir dire des trucs.
Comme ça, en passant.
Fuir, passer, contempler, se casser.
Ah connaître les choses, tout connaître.
Maitriser un art. Au risque de perdre le reste.
Et de perdre le fil.. du voyage.
Mais pour pouvoir dire les choses, il faut être invisible.
Etre visible, c'est être obligé de composer.
Composer, c'est un métier, à part entière.
Ici comme ailleurs, il faut paraître.
Etre n'a pas d'importance. Etre c'est trop.
Paraître, c'est prouver aux autres que...
Que rien, finalement...
Alors on joue. On joue une vie tous les jours.
C'est assez excitant, ce jeu.
Tu en connais un de meilleur?
Le pouvoir? Le sexe? L'argent?
Tout ça, c'est prouver.
J'ai besoin de prouver?
Oui.. Me prouver que je suis vivant.
Longtemps que ça dure..
Alors tu as des blessures..
Secrètes.
Les vraies blessures sont tellement secrètes
Qu'elles sont trop visibles.
On aime bien se mettre en scène.. De nos jours.
Important. Primordial.
Peut être même.. Vital.
On doit se confronter aux autres, se fracasser
Et même s'échouer. C'est excitant.
On aime bien les gens, mais pas trop.
Ceux de son monde oui. Les autres non.
Alors on invente des termes. Des excuses.
"c'est un con", "c'est une pute", "c'est un boulet"
Très facile, le "c'est pas moi, c'est les autres".
On en fait même une chanson "commerciale".
Comme si on ne passait pas son temps à se vendre.
Quand tu me regardes, tu peux me rendre beau
Tu peux me rendre laid, con ou intelligent.
Ca dépend de ton regard, mais aussi de toi.
Tu as sûrement besoin de rejeter les autres.
Oui les autres, qui ne sont pas "assez bien"
pas assez cultivés, pas comme toi.
Tu cherches le mieux,
le nec plus ultra, comme on disait
fut un temps..
Tu n'es pas encore Grand. C'est dommage.
Quand on est Grand, on prend tout. On ne laisse rien.
On n'a plus le temps de laisser. De ne pas finir son assiette.
De bouder, de dire du mal, de dire des saloperies. Pour heurter.
Une certaine sensibilité.
Je suis obligé de dire que je t'emmerde.
Ce n'est pas de gaieté de coeur.
Mais que veux-tu. C'est une réaction animale.
Je peux aussi te dire que je t'aime.
Mais aimer, c'est une faiblesse.
Tu le sais. Aujourd'hui. Aimer une personne.
C'est nul.
Comme les enfants.
Tu n'es pas Grand. Souviens toi.
Donc c'est nul.
Aujourd'hui, on n'aime que ce qui n'est pas humain.
L'humain, c'est mal. Ca tue.
Alors on se dit des choses, comme ça..
Finalement, le concept d'ombre est très à la mode.
L'intimité, qui te fait du mal.
L'intimité, avec laquelle, tu as du mal.
J'aime l'intimité. C'est le seul moment...
Où tu es vivant.
Le reste du temps, c'est de la petite mort..
J'aime cette intimité, que je vois des fois...
Mais on doit se vendre. Dire que tu aimes
ça, ça et ça.
Mais toi, tu es qui? "ça, ça et ça?"
Quel intérêt? Demain, tu seras
Sûrement comme tes parents.
C'est dommage. Dans un sens.
C'est très bien. Dans un autre.
Alors je peux parler. J'ai ce droit.
Pourquoi?
Souviens toi,
Je suis invisible.
Inexistant et de passage...

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