Et j'ai pris un bus pour un arrêt

Hier a été éprouvant. Un long combat contre moi-même. J'ai commencé dès le matin par écrire une page sur ce qui me bloquait dans le bus en listant les raisons, le pourquoi et le comment. Puis j'ai lu un livre que m'avait envoyé ma mère sur l'estime de soi. Je me suis surpris à lire une centaine de pages.  Sans réellement piger ce qui me concernait dans le cas présent. 

Si hier a été éprouvant, c'est que je m'étais dit, à ce moment là, qu'il fallait que je prenne le bus. Cette idée me séduisait énormément mais comme d'habitude, j'appréhendais. Si certains personnes atteinte de phobie passagères ou permanente font des crises de spammo et autres trucs bien gentil, moi je me contracte, je me tend et je ne dis plus rien. Fermé, j'attend que les choses passent en serrant les dents. Comme un boxeur dans le coin de son ring qui est en train de se faire rétamer sans possibilité de pouvoir s'en sortir, comme pris au piège. 

Si ça a été éprouvant, c'est que je n'ai pas pu prendre ce bus avant 17H30 alors qu'on est sorti à 13H00. Bon, il faut dire que j'avais fait. Je ne sais même plus d'ailleurs hier si j'ai pris un Xanax ou deux dans la journée. Le fait que j'en prenne un à 13H00 m' perturbé. Pour tout avouer, je ne voulais pas être sous l'effet du Xanax pour monter dans ce bus, même pour un arrêt. Mais j'ai eu une petite montée de panique dans le resto et j'ai voulu calmer ça par le moyen le plus rapide à ma disposition. Peut-être est-ce une erreur. On a donc mangé, et puis ensuite on est allé se promener jusqu'à ce qu'on tombe sur un arrêt. Encore. Je n'ai pas voulu y aller. Ne pas le prendre. Je voulais rentrer par mes propres moyens.

On est rentré, j'ai  cogité. Ma mère m'a appelé  Je me suis mis à lire deux pages sur l'autre livre acheté par ma mère, la pleine conscience de soi. Et j'ai fais les 100 pas dans l'appartement. Sandra m'a poussé toute la journée. Elle pense toujours que c'est comme allé à l'eau, qu'il faut se forcer. C'est pas cette sensation qu'il faut que je retrouve, voire peut-être trouve. C'est la sensation d'aimer ça. De réaimer la flotte comme j'ai aimé voyagé dans Paris quand j'étais plus jeune. Cette sensation agréable de se laisser, pour une fois, porter par les événements au lieu de les maîtriser  Je crois, peut-être d'ailleurs, en écrivant ces lignes, que j'ai tellement pas le contrôle sur les choses que je veux à tout pris maîtriser quelque chose. Voire quelque chose de mal. 

Donc je suis descendu. J'ai marché jusqu'à l'arrêt de bus. Je me souviens que ma tête était vide. Je me vidais la tête. Je me suis assis à l’arrêt  Les secondes et les minutes étaient interminables  Je savais que je devais le faire. Que je n'avais pas le choix. Plus le choix. Et que c'était bien comme ça. Le bus arrive. Je monte dedans. Et un plaisir indescriptible mêlé à une crainte hallucinante s'est emparé de moi. Retrouver un chauffeur. Pouvoir inséré mon ticket. Se glisser jusqu'au milieu du bus. Tous ces petits réflexes que je croyais abandonné à tout jamais sont revenus comme par magie; J'ai agrippé la première barre que j'ai pu. Et la première chose que j'ai faite, c'est de mater le plan des lignes. Comme en même disant : ça y est, je peux. Mais à la première difficulté, c'est-à-dire un feu rouge, donc un arrêt, je me suis arrêté de penser à ça et j'ai un peu paniqué. Je me disais : c'est pas grave, ça arrive. J'étais tendu, tendu. Peut-être pour ça d'ailleurs que j'ai un mal de dos de dingue aujourd'hui. Et dès que nous sommes arrivé à l’arrêt  Sandra m'a dit : tu veux qu'on continue ? J'ai failli dire oui puis tout d'un coup une grande peur s'est emparé de moi. Et je suis sorti. Avec un sentiment autant de honte que de joie d'avoir fait ça. J'aurais peut-être dû rester. Rester jusqu'à ce que je crève vraiment dans ce bus ou que je m'en sorte. Ne pas sortir dans que c'est pas le moment. Ne pas m'enfuir comme je l'ai trop fait pendant 2 mois ou je voulais aller le plus vite possible quitte à m'épuiser définitivement.

J'avais les mains trempées. Les pieds l'étaient encore plus. Une vraie piscine. On aurait pu piquer une tête chez moi. Je ne sais plus si j'avais autant marché de ma vie. Cette journée a été impressionnante. Je la raconte aujourd'hui avec tous les détails dont je peux me souvenir. Comme si c'était une expérience hors du commun alors que c'est le truc le plus anodin qui peut-être : manger dehors et prendre un bus...

Je ne sais pas si j'étais encore sous l'emprise du Xanax. Je ne crois plus trop, vu les réactions de mon corps. Cette épreuve a été longue. Mais ce qui m'étonne, c'est que j'ai été aussi bien que totalement effrayé. C'est ce dernier sentiment qui l'a emporté. C'est pour ça que ce combat est un demie victoire. J'aurais aimé pouvoir me contrôler dans cette situation et prendre un peu plus de joie à cette expérience. Se battre et danser contre sa phobie est quelque chose de particulier. L'accepter pour en faire une alliée, lui dire tout le mal qu'elle me fait mais qu'elle me fait, paradoxalement du bien puisque je me réapproprie, petit à petit, mon corps; mon espace, que je retrouve mon âme, mes pensées, mes réflexions.  Cette pute tente de me tuer mais j'ai bien envie de la baiser.

Je me demande quand même s'il y a beaucoup de gens qui ont des problèmes aussi simples qu'avoir une peur panique de quelque chose qui leur permet de se déplacer.

Le pire, c'est que j'ai passé ma vie sur des véhiculés à moteur... Dingue.


Crédit photographique: Watch4beauty

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